mardi 15 janvier 2013

Cartographie : vers l'anthropocène

 

Séquence paysage/ Cartographie
Vers l’anthropocène

Etape n°1 / Travail de groupe préliminaire.
Un travail de collecte de cartes de toutes origines a été effectué. Des regroupements et catégories ont été classées par l’ensemble de la classe. Par groupe de cinq, vous analysez l’organisation et l’utilisation des signes plastiques. Dossier A3.

Etape n°2 / travail par groupe de deux.
Vous choisissez un des deux textes proposés et vous lui appliquez la contrainte « oulipienne » S + 7.
La méthode S+7 consiste à remplacer chaque substantif (S) d’un texte préexistant par le septième substantif trouvé après lui dans un dictionnaire (S+7) donné.

Etape n°3 / travail personnel.
Vous utilisez ensuite ce nouveau texte comme « déclencheur » créatif et ainsi créez la carte d’un territoire de votre choix, inventé ou non, physique ou virtuel.
Vous appliquerez à cette création cartographique une sélection des codes graphiques analysés lors du travail de groupe préliminaire. Format libre. Techniques mixtes.


De retour à Saïmichte, nous passâmes une partie de la nuit à consulter la carte. Au sud-ouest de Nish, un chemin bordé de noms crochus et ensoleillés descendait
sur le Kossovo et la Macédoine. Nous prendrions par là.
De la haute ville aux quais de la Save, le chemin passe par un flanc de colline couvert de maisons de bois, de palissades vermoulues, de sorbiers, de touffes de lilas. Un coin agreste, doux, peuplé de chèvres à l’attache, de dindons, d’enfants en tablier qui font de silencieuses marelles ou tracent sur le pavé, d’un charbon qui marque mal, des graffitis tremblés, pleins d’expérience, comme dessinés par des vieillards. J’y suis souvent venu traîner au coucher du soleil, la tète à rien, le coeur en fête, poussant du pied des trognons de maïs, respirant l’odeur de la ville comme s’il fallait mourir demain et cédant à ce pouvoir de dispersion si souvent fatal aux natifs des poissons. Au pied de la colline un bistrot minuscule alignait trois tables en bordure du fleuve. On y servait un pruneau parfumé quitremblait dans le verre au passage des charrettes. LaSave roulait paisiblement son flot brun sous le nez des buveurs qui attendaient la nuit. De l’autre côté de l’eau on distinguait les broussailles poudreuses et les cabanes de Saïmichte, et quand le vent soufflait du nord je parvenais parfois même à entendre l’accordéon de Thierry, Ça gaze ou L’Insoumise, des airs d’un autre monde dont la tristesse frivole détonnait un peu ici.
L’usage du monde
Nicolas Bouvier
p. 111 oeuvres Quarto Gallimard

Venise a vaincu Ralph Rumney
LE SITUATIONNISTE BRITANNIQUE Ralph Rumney qui avait mené dès le printemps de 1957 quelques reconnaissances psychogéographiques dans Venise,s’était ultérieurement fixé pour but l’exploration systématique de cette agglomération, et espérait pouvoir en présenter un compte rendu exhaustif autour de juin 1958 (cf. une annonce du n° 29 de Potlatch). L’entreprise se développa d’abord favorablement. Rumney, qui était parvenu à établir les premiers éléments d’un plan de Venise dont la technique de notation surpassait nettement toute la cartographie psychogéographique antérieure, faisait part à ses camarades de ses découvertes, de ses premières conclusions, de ses espoirs. Vers le mois de janvier 1958, les nouvelles devinrent mauvaises. Rumney, aux prises avec des difficultés sans nombre, de plus en plus attaché par le milieu qu’il avait essayé de traverser, devait abandonner l’une après l’autre ses lignes de recherches et, pour finir, comme il nous le communiquait par son émouvant message du 20 mars, se voyait ramené à une position purement statique.
Les anciens explorateurs ont connu un pourcentage élevé de pertes au prix duquel on est parvenu à la connaissance d’une géographie objective. Il fallait s’attendre à voir des victimes parmi les nouveaux chercheurs, explorateurs de l’espace social et de ses modes d’emploi. Les embûches sont d’un autre genre, comme l’enjeu est d’une autre nature : il s’agit de parvenir à un usage passionnant de la vie. On se heurte naturellement à toutes les défenses d’un monde de l’ennui. Rumney vient donc de disparaître, et son père n’est pas encore parti à sa recherche. Voilà que la jungle vénitienne a été la plus forte, et qu’elle se referme sur un jeune homme, plein de vie et de promesses, qui se perd, qui se dissout parmi nos multiples souvenirs.
Internationale situationniste
Bulletin central édité par les sections de l’Internationale
situationniste
Numéro 1
Juin 1958 — Directeur : G.-E. Debord
Rédaction : 32, rue de la Montagne-Geneviève, Paris-Ve


Séquence paysage/ cartographie
RÉFÉRENCES

GALLICA
Visions du monde dans sa globalité ou reflet d’un territoire en évolution, les cartes plongent leurs racines dans l’Histoire et appartiennent à toutes les cultures. Si elles ont perdu aujourd’hui leur apparence d’objectivité et d’évidence, qualités supposées qui enchantèrent naguère des générations d’utilisateurs de la carte d’Etat-major, elles n’ont en rien perdu de leur pouvoir de séduction. Bien au contraire, elles se sont diversifiées et banalisées avec les outils informatiques mis à la disposition de tout un chacun.
Conçue par un cartographe professionnel ou un amateur, la carte est tributaire des connaissances, des outils et des objectifs poursuivis tout autant que des conventions sémiologiques de son temps. Son étude révèle donc les implications sociales, les enjeux intellectuels ou politiques dont elle est porteuse, ainsi que l’aptitude de ce langage graphique à dire et comprendre le monde qui nous entoure, les phénomènes de tous ordres qui s’y manifestent, de la météorologie à la cartographie de l’Internet.
Bien qu’attestées depuis l’Antiquité (Eratosthène, Ptolémée, etc.), très peu de cartes de ces époques anciennes sont parvenues jusqu’à nous. En revanche, la production du Moyen Age et surtout des siècles suivants est abondante.
Cartes du monde, cartes des pays et des continents, cartes des diocèses ou des gouvernements, plans et vues de villes, cartes topographiques, mais aussi cartes nautiques, plans d’îles ou d’estuaires, profils de côtes, ou encore cartes du ciel et de la lune, la cartographie sous toutes ses formes est représentée dans les collections numériques de Gallica, qui fait la part belle aux trésors du département des Cartes et Plans de la BnF.

GLOBAIA, l’anthropocène
Techniquement, l’Anthropocène est la période la plus récente du Quaternaire, succédant à l’Holocène. Le Quaternaire, c’est une période de l’histoire de la Terre caractérisée par des glaciations nombreuses et cycliques, amorcée il y a deux millions cinq cent quatre-vingt-huit mille années (2,588 Ma). Le Quaternaire se divise lui-même en trois époques : le Pléistocène, l’Holocène et, désormais, l’Anthropocène.

SOCKS
Une sélection de cartes les plus anciennes.

LE MONDE DIPLOMATIQUE
Le site cartographie / Philippe Rekaciewiecz
Une sélection de cartes sur l’état du Monde contemporain.

VISIONS CARTOGRAPHIQUES, le blog de Philippe Rekaciewicz
Un article sur des réfugiés mauritaniens à Dakar qui font une grève de la faim. Le monde des cartes est indissociable du monde vécu par les hommes et les femmes.

CAFÉ GÉOGRAPHIQUE à Nantes le 19 octobre 2010
Dont une intervention de Philippe Rekaciewizc

ARTICLE « L’infographie dans la production du savoir » de Giulio Frigeri
(...) Le terme composé « infographie » désigne une famille de dispositifs servant au traitement graphique d’une information quantitative ou qualitative : une carte, un graphique, une illustration technique, une matrice, un organigramme et dont la création peut relever de différents contextes éditoriaux, et qui poursuivent de multiples objectifs de communication, traitent une infinité de sujets, utilisent des technologies très variées et conduisent à des résultats d’excellente comme de très médiocre qualité. En somme, une sorte de fourre-tout… (...)

DATA JOURNALISM AWARDS 2012
De formidables infographies souvent en relation avec la cartographie

PAPIER BROUILLON, Le blog de Jean Abbateci
L’actualité du data-journalisme

FAIRE DES CARTES, l’atelier de cartographie de SciencesPo.
De riches renseignements sur la nomenclature et les signes plastiques pour créer des cartes.

COURS de Maryvonne Longeart
La question de la représentation des surface de pays proportionnelles aux données utilisées / Mercator / Peeters Qu’est-ce qu’une représentation objective de la réalité ?

HUMAN WORLD ATLAS Antonio Scarponi
Animation de la représentation de la planisphère dont la surface des pays est proportionnelle au nombre d’internautes.

Blog SERIAL MAPPER
Serial mapper, un blog qui recense une grande variété de modes de représentation des cartes géographiques.

Magazine SCIENCE HUMAINES
Un entretien avec Christian Grataloup, géohistorien.

FRANCE CULTURE Émission Culture monde : « dessiner le monde »

1/4
Voici un extrait d’un épisode de la série américaine The
West Wing, qui se passe à la Maison Blanche et décrit son
fonctionnement. On entend les conseillers du Président qui
reçoivent un collectif pour les cartes et la justice sociale:
ils expliquent devant leurs yeux ébahis que les cartes qu’on
utilise aujourd’hui ne sont tout simplement pas bonnes, et ne
représentent pas correctement la réalité des continents, de
leur place et de leur taille. On interroge assez peu, c’est vrai,
les planisphères qui illustrent nos manuels de géographie,
ils nous paraissent naturels: c’est la vision qu’on a tous peu
ou prou du monde aujourd’hui, avec l’Europe au centre-nord,
l’Afrique qui paraît guère plus grande que l’Amérique Latine,
elle-même à peu près grande comme l’Alaska. Pourtant il
existe d’autres manières de représenter le monde, de tracer
les frontières, et cette instabilité de la carte est fonction de
changements historiques, mais aussi géopolitiques.
Qui a dessiné nos fonds de carte, qui a découpé les
continents ? Et si on en changeait ?

2/4
Voilà on entend ici les explorateurs de l’ « île au trésor »,
dans une adaptation télévisée du fameux roman d’aventures
de Robert Louis Stevenson publié sous la forme de feuilleton
à partir de 1881. Ils viennent de mettre la main sur la
précieuse carte qui les lancera sur des océans inconnus et
dangereux. Stevenson raconte d’ailleurs qu’il a dessiné cette
carte avant d’écrire son roman, un après-midi pluvieux où il
avait emprunté à son fils des crayons de couleur. La carte
précédait donc le récit.
La carte est un objet de fascination dans la littérature
d’aventures, et les cartes anciennes sont en elles-mêmes
des trésors. Elles sont des objets précieux, au-delà, ou peutêtre
en deça, des informations qu’elles donnent. La carte
est peut-être avant tout un dessin, un ensemble de tracés,
avec des motifs, des couleurs, une harmonie particulière. La
carte fascine le collectionneur qui les expose, et l’artiste qui
les dessine ou les détourne.
Alors en quoi la carte est-elle un objet d’art, et le cartographe
un artiste ? On verra comment on expose la carte, on verra
aussi comment l’artiste s’empare de ses possibilités et de
ses contraintes.

3/4
On entendait Guy Vadeboncoeur, le commissaire canadien
d’une exposition consacrée aux cartes à Saint Malo cette
année, il parlait des exigences qui doit avoir celui qui
« fabrique les cartes ». Aujourd’hui on va parler du métier
de cartographe, et pas de n’importe quel cartographe,
puisqu’on va parler plus particulièrement de la posture de
cartographe engagé.
La carte n’est pas un objet neutre, c’est une création
ô combien subjective, on en a parlé ces deux derniers
jours avec Christian Grataloup et Catherine Hofmann. Le
cartographe, enquête, relève, et dessine, en fonction de ses
propres émotions et de ses propres révoltes. Alors est-ce
que la carte peut-elle et doit-elle être un objet critique?
Comment travaille le cartographe lorsqu’il est confronté à
l’injustice, à la guerre, à l’instabilité des territoires? Est-ce
que ses propres émotions travaillent et modifient le résultat
de son travail?
On en parlera toute à l’heure avec Khalil Toufakji, qui est
cartographe à Jérusalem, et qui a longtemps travaillé pour
l’Autorité palestinienne, ainsi qu’avec Delphine Papin, qui est
cartographe au journal Le Monde.

4/4
C’était des contributeurs au projet OpenStreetMap dont il va
largement être question aujourd’hui des gens comme vous
et moi qui, quand ils se promènent, font aussi des relevés: un
banc, un pont, une piste cyclable. Ils relèvent des données,
et les inscrivent sur un site internet: ils participent ainsi à
ce qu’on pourrait à l’inventaire du monde en quelque sorte.
Un exemple spectaculaire de ce que le numérique a apporté
à l’activité cartographique. La toile et les hautes technologies
ont en effet bouleversé les usages de la cartographie.
Aujourd’hui tout utilisateur de smart-phone ne se perd plus
jamais, puisqu’il a toujours à disposition, dans sa poche, une
carte précise et qui ne le quitte pas.
Et pourtant il y a encore des zones du monde peu ou pas
cartographiées, ou alors des zones om l’accès à la carte
n’est pas facile, ou pas gratuit.
Comment le numérique et ses outils ont-ils changé l’activité
cartographique ? Comment fonctionnent les cartes qu’ont
voit sur le net, d’où viennent les données qui les composent ?

VOCABULAIRE

artefact
En anthropologie, produit ayant subi une transformation, même minime, par l’homme, et qui se distingue ainsi d’un autre provoqué par un phénomène naturel.
plan
Carte représentant une surface d’étendue suffisamment restreinte pour que la courbure du sol puisse être négligée et que, de ce fait, l’échelle puisse être considérée comme constante.
carte
Représentation graphique réduite de la surface, ou d’une portion de surface, du globe terrestre.