dimanche 9 octobre 2016

Les contrastes de couleurs par Johannes Itten

Pieter Bruegel. "Paysage avec la chute d'Icare" vers 1529-1569
Dédale était cet architecte qui construisit, en Crète, le Labyrinthe pour le Minotaure et qui montra à Ariane comment Thésée pourrait en sortir. En apprenant que les Athéniens avaient trouvé le moyen de s’en échapper, le roi Minos fut aussitôt convaincu qu’ils n’auraient pu y réussir sans l’aide de Dédale. En conséquence, il emprisonna l’architecte et son fils dans ce même labyrinthe, ce qui tendrait à prouver l’excellence du plan de cet enclos, puisque sans indication, même son auteur ne pouvait en découvrir l’issue. Mais le grand inventeur n’était pas en peine pour si peu. Il dit à son fils :
«La fuite peut être entravée par la terre et par l’eau, mais l’air et le ciel sont libres.» et il fabriqua deux paires d’ailes, qu’il fixa avec de la cire à ses épaules et à celles de son fils Icare. Avant de prendre leur envol, Dédale recommanda à Icare de ne pas s’élever trop haut sur la mer, car, dit-il, en approchant de trop près le soleil, la cire pourrait fondre et les ailes se détacheraient. Mais comme tant d’histoires nous le montrent, la jeunesse ne tient guère compte de ce que disent les aînés. Tous deux s’élevèrent donc, légèrement et sans effort, et quittèrent la Crète ; le ravissement de ce nouveau et merveilleux pouvoir grisa l’adolescent. Il monta de plus en plus haut, refusant d’entendre les appels angoissés de son père. Et ses ailes se détachèrent. Il tomba dans la mer et les eaux se refermèrent sur lui. Note A (bas de page) Le père affligé poursuivit sa route sans accident et atterrit en Sicile où il fut fort bien accueilli par le roi Cocalos.
Rendu furieux par cette fuite, Minos décida de retrouver Dédale. Pour y parvenir, il employa la ruse. Il fit proclamer partout qu’il accorderait une grande récompense à quiconque réussirait à passer un fil dans les volutes d’une coquille aux spirales particulièrement enchevêtrées. Dédale déclara au Roi de Sicile qu’il se faisait fort d’y parvenir. Il perça d’un petit trou l’extrémité de la coquille, fixa un fil à la patte d’une fourmi, introduisit la fourmi dans l’orifice, qu’il boucha. Quand la fourmi sortit enfin par l’autre extrémité dela coquille, le fil, bien entendu, l’avait suivie dans tous ses tours et détours. «Seul Dédale pouvait imaginer pareil stratagème», dit Minos, qui se mit en route pour la Sicile afin de se saisir de l’architecte. Mais le roi Cocalos refusa de le livrer et dans la lutte qui suivit, Minos trouva la mort.
Pieter Bruegel était des Pays-bas et ses œuvres expriment tout autre chose que la peinture contemporaine d’Italie. A la somptuosité italienne de la Renaissance, à sa tendance idéaliste, Bruegel opposait les représentations réalistes de son entourage paysan et les tableaux de mœurs. Il ne peignait pas des personnages individuels idéalisés, mais des foules populaires, paysannes, en groupe plus ou moins grands. Au lieu de madones, il peignait des types populaires profanes avec leurs passions et leurs infirmités, leurs travaus et leurs fêtes. Les scènes qu’il représente sont celles de places de villages envahies de gens et il peint aussi en détail de larges paysages.
Dans le paysage avec la chute d’Icare, Bruegel a placé les personnages comme sur une scène dans un paysage large et grandiose. Au premier plan va un paysan avec sa charrue et son cheval ; un berger se tient debout auprès de son troupeau qui paît et un pécheur est assis au bord de la mer. (...)
Personne sur la terre ne remarque Icare qui tombe du ciel dans la mer et personne ne s’occupe de son sort. Le jugement réaliste de Bruegel concernat le fantastique Icare s’exprime ici dans toute sa clarté. (...)

Johannes Itten in « art de la couleur » p.108

Johannes Itten " art de la couleur " (1961) Editions DESSAIN & TOLRA

Les 7 contrastes de la couleur :
1 - le contraste de la couleur en soi
2 - le contraste clair-obscur
3 - le contraste chaud-froid
4 - le contraste des complémentaires
5 - le contraste simultané
6 - le contraste de qualité
7 - le contraste de quantité
1 - Le contraste de la couleur en soi


« La force de l'effet de contraste de la couleur en soi diminue à mesure queles couleurs employées s'écartent des trois couleurs primaires. »
 
« Le contraste de la couleur en soi est encore augmenté si ces couleurs sont séparées individuellement par du noir et du blanc. Jusqu'à un certain point . »

2 - le contraste clair-obscur 



« Les couleurs blanches et noires sont le plus fort moyen de l'expression du clairet de l'obscur. Sur le cercle chromatique, c'est le jaune et le violet. »
« Le gris est neutre, infécond et sans expression. Il ne reçoit la vie et un caractère que par les couleurs qui l'avoisinent. Il affaiblit leur force et les adoucit. »
« Les termes grand/petit, noir/blanc, chaud/froid, à leur point le plus élevé sont des contrastes polaires. »

3 - le contraste chaud-froid 



« froid/chaud, ombragé/ensoleillé, transparent/opaque, calmant/exitant, fin/épais, aéré/terreux, lointain/proche, léger/lourd, humide/sec »

« Dans le paysage apparaissent des objets éloignés, de couleur de plus en plus froide, à cause des couches d'air qui s'intercalent. Le contraste froid/chaud renferment donc des éléments d'effet que suggère la proximité et l'éloignement. C'est un moyen de représentation important des effets de perspective et de relief. »

4 - le contraste des complémentaires 



« Deux couleurs pigmentaires qui, mélangées, donnent du gris-noir neutre, nous les désignons sous le nom de complémentaires. Physiquement, deux lumières colorées qui, mélangées, donnent de la lumière blanche sont également complémentaires. »
 
Jaune // violet = jaune // rouge et bleu
orange // bleu = jaune et rouge // bleu
rouge // vert = rouge // bleu et jaune

« Plus une couleur est éloignée d'une autre dans le cercle chromatique, plus la force du contraste est grande. »

5 - le contraste simultané 


« Par contraste simultané nous désignons le phénomène qui fait que notre Ïil, pour une couleur donnée, exige en même temps, donc simultanément, la couleur complémentaire, et qu'il l'engendre lui-même si elle n'est pas donnée. »

6 - le contraste de qualité 
 


« Par notion de qualité de la couleur, nous entendons le degré de pureté ou de saturation des couleurs. Nous désignons par contraste de qualité l'opposition de couleurs saturées, lumineuses, et de couleurs éteinte, ternes. Parmi les couleurs pigmentaires, ..., dès que les couleurs pures sont éclaircies ou obscurcies, elles perdent en luminosité. »

« Les couleurs peuvent être rompues de 4 manières différentes :
* Avec du blanc. Le caractère coloré devient ainsi un peu plus froid.
* Avec du noir.
- perd son caractère rayonant
- maladif
- impuissant
- néant sans lumière
- paralysé
- s'éteint
D'une façon générale, le noir prend aux couleurs leur luminosité. Il les rend étrangères à la lumière et les tue plus ou moins vite.
* avec du gris
* par mélange des couleurs complémentaires correspondantes. »

7 - le contraste de quantité 



« Le contraste de quantité concerne les rapports de grandeurs de deux ou de plusieurs taches de couleur. C'est donc l'opposition "beaucoup et peu" ou "grand et petit". Deux facteurs déterminent la force de l'effet d'une couleur. Premièrement sa luminosité et secondement la grandeur de la tache. »

« Les rapports harmonieux de tache pour les couleurs complémentaires sont les suivants :
  • jaune / violet = 1/4 - 3/4
  • orangé / bleu = 1/3 - 2/3
  • rouge / vert = 1/2 - 1/2